Partir au monde

Partir au monde
Découvrir en soi...

samedi 8 décembre 2018

Voici le texte envoyé sur le site de Yoani Sanchez. Madame, Je reviens d’un voyage d’un mois à Cuba, de Caïmito à Pinard del Rio, sans l’assistance d’un voyagiste . Votre point de vue est très critique sur le régime et à vous lire,rien ne trouve grâce à vos yeux dans cette île. Je ne prétends pas tout connaître sur votre pays, ou un autre quel qu'il soit, et resterais donc prudent sur les conditions de vie sur l'île. J'ai également voyagé dans plusieurs pays: Afrique, Amérique centrale et du sud et caraïbes. J'ai ramené de ces incursions des impressions accablantes: inégalités abyssales, extrême pauvreté, violence (allez à San José ou Lima et vous verrez la différence avec la Havane!), peu ou pas de protection sociale, déscolarisation, habitat insalubre et déglingué dans les bidonvilles et, surtout, le travail des enfants. Au cours de notre périple dans votre île, nous n'avons pas ressenti de situations aussi extrêmes. Ce sont les enfants qui ont attiré notre attention: partout ils sont habillés correctement, pas dénutris et-semble-t-il largement scolarisés, pris en charge par la société. Avez-vous voyagé dans des pays classés en voie de développement, comparables à Cuba en termes de PIB ? Pour ma part, après cette rapide incursion cubaine, je me dis que bien des classes pauvres des pays émergents se contenteraient des protections sociales mises en place par ce régime qui résiste à la domination capitaliste, avec ses dégâts sur la planète et sur les hommes. Alors que nous étions à La Havane, un nouvel attentat survenait aux USA, dans une école, avec de nombreuses victimes. Depuis, il ne se passe pas un mois sans que des morts s'ajoutent aux morts. Ne pensezvous pas que le régime américain à un lien direct avec cette violence congénitale? C'est ce système guerrier, raciste et corrompu par l'argent que vous rêvez pour Cuba ? A aucun moment, durant notre voyage, nous n'avons ressenti de l'insécurité (en ville ou dans les campagnes) et vu de violences. Comment expliquez-vous cette apparente tranquillité ? N'est-ce pas la marque d'un système où l'argent n'est pas la valeur morale suprême ? Un système où l'individualisme et le consumérisme ne sont pas l'alpha et l'oméga des rapports humains? Je vous envoie un lien reproduisant un entretien que vous avez eu avec un universitaire français, il y a quelques années. L'entrevue a eu lieu dans un hôtel huppé de la Havane, au vu et au su de tout le monde, sans que vous soyez inquiétée, alors que vous passez pour une dissidente persécutée (avec beaucoup de moyens pour un pays où le salaire moyen est de 25 euros)! Bizarre, non? Ma conclusion après ce voyage: Cuba n'est ni le paradis, ni l'enfer, mais une construction humaine (avec ses faiblesses mais aussi sa redistribution sociale et son niveau d'éducation) différente du modèle dominant planétaire qui ne fait pas envie, mais pas du tout envie. Ce modèle ne fonctionne qu'au prix de guerres et d'exclusion de centaines de millions d'individus et d'enfants devenus des «surnuméraires» abandonnés à eux-mêmes. Nos interlocuteurs nous l'ont dit: Cuba pourrait bouger plus vite si l'hostilité US et l'embargo ne freinaient pas les réformes souhaitées. Au fait, combien coûte l'embargo à Cuba? 135 milliards depuis 1962 et 4,3 en 2017. Pourquoi n'en parlez-vous pas ou si peu? Pourquoi ne mettez-vous pas votre renommée au service d'une campagne mondiale contre l'embargo? Ce sont les plus fragiles qui trinquent avec ce blocus. Êtes-vous indifférente à leur sort ou bâillonnée par vos sponsors occidentaux? Vous militez ouvertement pour «un capitalisme sui generis». J'observe que des capitalismes «sui generis» sont installés quasi partout dans le monde. Ils se ressemblent tous, avec des variantes selon les résistances citoyennes et les traditions démocratiques:autoritarisme, inégalités, pauvreté, pillage de la planète, discriminations de genre ou d'orientations sexuelles,absence de laïcité, pollutions, information pilotée par les milliardaires...Seules quelques rares expériences de «socialisme sui generis» prouvent qu'un système alternatif peut éradiquer l'extrême pauvreté, éduquer et élaborer de la démocratie participative n'excluant pas les damnés de la terre. Je l'ai constaté au Pérou. Je souhaite que Cuba et son peuple ne connaissent pas l'aventure qui vous tente et vous feriez bien d'ouvrir les yeux sur les tares d'un système que je connais trop bien dans mon pays. Vous prétendez être la championne de la liberté d'expression? Je suis curieux de voir ce que vous allez faire de mon message qui pourrait mettre un peu de diversité dans votre blog assez monocorde! DaPitù (sans frontières ) PS: dans votre pays, noté comme une dictature par les médias capitalistes, une nouvelle constitution est entrain de se construire avec la participation active du peuple. En France, le peuple découvre après coup les modifications constitutionnelles, adoptées par un cénacle de députés et sénateurs, sans débat populaire et sans consultation électorale! Faut-il en déduire que nous sommes en dictature? Envoi via le site Association Cuba Coopération (http://cubacoop.org/)